Chroniques & autres considérations

L’HOMME QUI VOULAIT ÊtRE HEUREUX (Laurent Gournelle)

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Certains livres que vous n’auriez jamais achetés arrivent entre vos mains sans prévenir. Ils peuvent être l’occasion de découvrir un auteur talentueux dont vous ignoriez l’existence ou bien, à l’inverse,  ils nous ouvrent les portes d’un style médiocre, sans aucune originalité, et surfant sur les modes du moment. Assurément, L’homme qui voulait être heureux, de Laurent Gounelle, fait partie de cette seconde catégorie. Cadeau de mes parents lors d’un Noël, il est resté un moment sur les étagères, le temps que je termine la lecture de quelques romans de cet écrivain de génie qu’était Philip K. Dick. Le décalage n’en a d’ailleurs été que plus fort, un peu comme si vous passiez d’un foie gras à un vulgaire pâté discount. Pourtant, cet ouvrage se classe parmi les meilleures ventes du moment en librairie.

L’histoire est très banale.  En vacances à Bali, un homme se décide à aller consulter un guérisseur renommé avant de repartir chez lui. Shaman de son état, celui-ci lui fera prendre conscience de tout ce qui entrave son bonheur à vivre.  Si d’un point de vue strictement physique, il est en parfaite santé, son âme ne se porte pas aussi bien.  Ce constat dressé, il lui propose une thérapie afin de reprendre le contrôle de cette vie qui lui échappe. Et c’est ainsi que nous voilà partis pour un peu plus de 200 pages d’un discours psychologique populaire de bas étage à la sauce new-âge, versant dans cette veine feel good dont les têtes de gondole dégueulent. Rien d’étonnant donc au classement de cet ouvrage dans la catégorie « Développement personnel ».

« Ne laisse jamais personne te dire ce dont tu es capable. C’est à toi de choisir et de vivre ta vie. »

(L’homme qui voulait être heureux)

Au fil des chapitres, le lecteur apprendra que tout se passe dans la tête, dans laquelle nos croyances inscrites depuis notre plus tendre enfance conditionnent nos choix et notre vision de la vie. Il n’appartient qu’à nous de nous en affranchir pour recouvrir la pleine destinée de notre existence.  Pour résumer, quand nous voulons vraiment, nous pouvons. Vous avez un métier dans lequel vous n’êtes pas pleinement épanoui, une famille qui vous pèse ? Qu’à cela ne tienne. Rien ne vous empêche de faire fi du jugement de votre entourage et de tout plaquer pour rebâtir une vie conforme à vos rêves. Le manque de  finance, les expériences à acquérir, l’absence d’un réseau relationnel, aucune de ces réalités ne sauraient constituer un obstacle. Ce « roman » donne de l’être humain une vision intrinsèquement positive. Rien n’est impossible pour qui veut y croire et s’en donner les moyens.  Tout cela est donc très cucu la praline et naïf. Il n’est cependant pas étonnant que ce livre rencontre un franc succès puisqu’embrassant cette mode du développement personnel à travers des théories simplistes.

Si encore le style était de qualité, il m’aurait été possible de défendre à minima ce livre. Ce n’est même pas le cas. Au contraire… Le récit est mal écrit, avec des dialogues aux tournures creuses, sans intérêt et des comparaisons qui pourraient figurer en bonne place dans la rédaction d’un élève moyen.  En somme, si vous avez une vingtaine d’euros à mettre dans un livre, je vous conseille plutôt de vous orienter vers des romans autrement plus littéraires à l’image de ce bijou qu’est Le prophète de Khalil Gibran. Il y a certainement bien plus à en retirer niveau développement personnel et la poésie qui en imprègne les lignes est un délice, à cent lieues de cet homme qui voulait être heureux.

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